Monday, August 16, 2010

Flash back (3)

Alicante, 15 août 2007

Madrugada. Ces jours-ci, la Terre passe dans le sillage d’une comète. Une pluie d’étoiles est visible au nord-est. Tu as téléphoné à Marie pendant une heure et trente minutes en bas dans la rue. En tirant sur tes clopes tu l’écoutais te raconter ces théories sur les chiffres, son séjour à Noirmoutier, la pluie sur l’île, le froid du mois d’août, là-bas, le vélo-canne d’Alix. Vous parlez comme deux sœurs. Tu as oublié le nombre d’année qui vous unis comme amies. Qu’importe, il n’est plus nécessaire de l’évoquer. Tu avais loué un film et as dû l’interrompre pour descendre dans la rue passer le coup de
fil. Il était tard.
Les mois d’été s’étirent. Tu dois écrire un nouveau projet mais rien ne vient. Panne sèche. Tes idées sont taries. Tu tournes en rond, fumes dans la journée. Beaucoup. Passes des disques. Quand tu passes ces disques ou écoutes des morceaux de musique à la radio, tu es cinquante ans plus tard. Car tu sais que ces souvenirs, tu ne les auras pas oubliés dans des dizaines d’années. Peut-être te paraîtront-ils plus petits mais ils auront la même intensité. Ils te rendront la sensation que quelque chose s’est passé. Pas rien. Quelque chose d’important. Maintenant tu penses que tu peux t’approcher de la porte, passer un dernier coup d’œil sur ce qui se déploie derrière et puis la fermer doucement, sans regret, sans douleur. Tu as regardé ta montre que tu n’as pas, le soleil et puis tu as dit oui, c’est le moment. Je l’ai attendu. Bien sûr il y a la peine. Avec l’écriture tu arriveras à l’atténuer un peu. Tu ne veux pas aller dormir ni t’alimenter. Tu voudrais écrire toute la nuit. T’écrire à toi-même. Tu as laissé la bande sonore du DVD tourner dans l’ordinateur. Tes voisins vont devenir complètement fous à force d’entendre en boucle le même morceau de musique. Mais en Espagne, les voisins ne deviennent jamais fous. Tu deviens
fou avant eux. Et cette répétition sonore t’aide. Tu as accroché tes cheveux à l’aide d’une barrette. Les documents sont empilés sur la table. A côté, ta carte d’accès à l’institut, les clés de l’appartement, un dépliant comportant les horaires du tranvia, la boîte à lunettes que tu ne mets plus, des disquettes, le téléphone portable. Cette nuit tu as rêvé que la voisine d’en face enjambait la rue, passait de son balcon au tien pour te demander du sel. Du sel? Oui du sel. Ta voisine t’a demandé du sel puis elle est repartie chez elle comme un chat volant.Marie a lu les textes sur ton blog et dit qu’elle ne comprenait rien. Tu as ri à gorge déployée. Ensuite elle t’a parlé d’un livre d’un auteur espagnol qu’elle avait lu récemment et qui l’avait fasciné: «L’ombre du vent». Un grand best-seller dont tu as entendu les éloges à maintes reprises. Hier, dans la nuit, tu as achevé «Le livre d’un homme seul» de Gao Xingjian. Il termine ses pages sur Barcelone où l’ont emmené des amis du club littéraire de Perpignan. C’est curieux, ce livre qui parle de la Chine pendant la révolution culturelle se termine sur l’Espagne. Tu penses à Hemingway et le jour se lève aussi. Cette fascination pour l’Espagne. A la fin de son roman, la femme qu’il aime lui demande de venir la rejoindre à Madrid où elle était partie avec un torero rencontré aux fêtes de Pampelune. Il prend le premier train pour aller la consoler. La romance est partie en vrille. Il fallait bien quelqu’un pour la consoler. Consoler l’être aimé parti avec un autre. En ces terres arides, tu as souvent pensé à celui qui pourrait être l’homologue de cette femme du roman. Tu as traversé des déserts. Tu as aussi pensé à tous les paysages qui t’attendent. Tu as éteint la musique maintenant. La nuit est calme. Le quinze août ça sent toujours le vide, les gens partis, absents, les maisons inoccupées. Un désert rempli de mirages. Il n’est plus qu’un mirage. Tu ne l’as pas photographié. Tant pis.
Des fois tu penses à la maladie. Pas à la mort, à la maladie. Le corps qui défaille. Pourquoi? Le corps qui dit zut. La vie et les expériences passent sur le corps. Tu ne veux pas être en colère. C’est une lutte acharnée. Tu la fou dehors. La porte n’était-elle donc pas fermée? Mais elle revient sans cesse. Tu es en colère quand la colère revient. Cercle vicieux. Tu fermes les yeux et mentalement dessine un cercle autour de toi. Dans ce périmètre tu lui interdis d’entrer. Et tu répètes cette construction mentale afin qu’elle s’incruste dans les replis du cerveau. Et puis il y a tout le reste. La «vastitude» - Cécile aurait aimé ce mot. Ampleur. Le monde, l’inconnu aussi, loin, là-bas. Tu pars de toi et lances des projections tout autour, des bras invisibles longs de plusieurs kilomètres atteignent l’inconnu et le connu et te font sentir le monde. Mais le monde, il ne bouge plus.

2 comments:

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